Je suis heureux de vous présenter Echoes of Light and Shadow, une vidéo de quinze minutes réalisée durant l’hiver 2024-2025 avec mon ami et complice de toujours, Richard Tardif. Tournée dans mon atelier du quartier Saint-Henri à Montréal, cette capsule vous invite à entrer dans mon univers créatif — un espace habité par la mémoire, la lumière, les pigments et les visions intérieures.
C’est Maia Sylba, éditrice de la revue internationale Musetouch Visual Arts Magazine, qui m’a invité à créer cette vidéo. Depuis quelques années, nous partageons un dialogue fertile entre arts visuels, poésie, danse et rêve. Au départ, j’avais imaginé un simple montage d’images et de citations. Mais le projet m’a vite échappé. Il s’est imposé comme une nécessité. J’ai rêvé d’un film plus personnel, une œuvre introspective où je me mettrais à nu — malgré mes hésitations à entendre ma propre voix ou à me voir à l’écran.
J’ai donc écrit un scénario, choisi des musiques qui correspondaient à ma vision, et passé des jours et des nuits à travailler avec Richard. Il connaît mon parcours depuis l’époque où je siégeais à la Cour fédérale du Canada. Déjà à ce moment, l’art vivait en moi, en filigrane du droit.
J’ai choisi de m’exprimer en anglais, ce qui peut surprendre. Le français est ma langue maternelle, mais l’anglais s’est imposé naturellement. J’ai passé de nombreuses années à Ottawa à rédiger mes jugements dans cette langue. Mais il y a aussi une raison plus intime. Mon père était anglophone, ma mère francophone. À la maison, le français dominait, sauf quand mon père avait quelque chose de grave ou de secret à dire à ma mère — alors, il le disait en anglais. Cette langue est devenue pour moi un lieu de distance, une manière d’apprivoiser l’émotion.
En vieillissant, j’ai découvert la poésie anglaise. J’ai commencé à écrire — et même à rêver — en anglais. Certaines émotions profondes ne trouvent leur voix que dans cette langue. Comme s’il y avait en moi deux sensibilités, deux solitudes, deux récits.
Je tenais aussi à donner la parole à Maia dans cette vidéo. D’origine slave, elle s’exprime elle aussi en anglais, qui n’est pas sa langue natale. Il s’est dessiné entre nos deux voix une résonance, un écho, une symétrie — une connivence née de nos altérités respectives.
Car nous sommes faits d’ombre et de lumière. Derrière le masque de l’acteur, il y a l’être fragile, traversé de doutes. Parler du cœur, c’est risquer l’indicible. Arracher au silence un cri, ou au moins un souffle — celui d’une voix ancienne qui ne s’est pas encore éteinte.
Je compte bientôt préparer une nouvelle vidéo, cette fois en français, qui explorera d’autres facettes de mon travail, notamment la série Constellations familiales. En attendant, je vous invite à découvrir Echoes of Light and Shadow, disponible ici :
Créer, c’est une forme d’alchimie : oser transformer le gris du réel en couleur, et le silence… en poésie.
Luc Martineau